Comme chaque année, la circulaire de rentrée du Ministre de l'éducation nationale décrit les priorités et les nouveautés qui entrent en vigueur à partir de septembre : renforcement de l’éducation aux médias et à l’information qui inclura « la connaissance des droits et devoirs dans l’espace numérique et des risques liés en particulier aux usages des réseaux sociaux » et « développement des compétences numériques (…) avec le déploiement de « Pix sixième » à l’ensemble des collèges ».
En outre, l’année 2023 verra la mise en œuvre de la stratégie du numérique pour l'éducation 2023-2027, rendue publique en janvier dernier. Une stratégie déclinée depuis dans une doctrine technique, qui s'inscrit dans une logique de plateforme.
En vue de renforcer la formation des enseignant.e.s, un Pix spécifique, dénommé « Pix+ Édu » a été expérimenté sur quelques territoires pour préparer la future mise en place de la certification des compétences numériques des enseignant.e.s.
Face aux enjeux d’éducation au numérique, le ministère de l’Éducation prévoit d’étendre l’attestation de sensibilisation au numérique (« Pix 6e ») pour les élèves de 6e sur l’ensemble du territoire.
Avec l'avènement des appareils portables, de l'accès Internet haut débit et des plateformes d'apprentissage en ligne, la question se pose de l’avenir des salles informatiques. Communautés éducatives et collectivités (en charge de l’équipement numérique des établissements) sont confrontées à plusieurs défis : coût élevé et maintenance des salles informatiques, limitation de la mobilité des élèves et des enseignant.e.s, évolution des méthodes d'apprentissage, intégration de la technologie dans les salles de classe ordinaires...
Stratégie du numérique pour l’éducation 2023-2027
Le ministère de l’Éducation nationale a rendu publique en janvier 2023 une stratégie du numérique pour l'éducation 2023-2027. Ce document a pour ambition de définir la vision stratégique du numérique pour l’éducation en France, pour la période 2023-2027 « Il vise à ce que les acteurs s’accordent sur une vision commune, sur des transformations inédites, qui seront à mener et à réussir ensemble ».
Les auteurs de la stratégie dressent, notamment, le constat d’un « accès inégal au numérique par les acteurs », qu’il s’agisse de l’équipement, de la connectivité, des outils ou des capacités. « Cela peut créer des difficultés pour les populations en situation d’exclusion numérique ou ayant de fortes difficultés à y accéder. (…) Ces difficultés d’accès au numérique créent des inégalités d’apprentissage et placent les questions d’inclusion numérique et de l’égalité d’accès au service public du numérique éducatif au premier plan ».
Ils pointent, par ailleurs, « une expérience utilisateur dégradée ». « Les enseignants, les élèves, les familles ou tous les personnels de l’éducation signalent des difficultés dans l’usage des outils numériques proposés par l’écosystème de l’éducation : des interfaces complexes et hétérogènes, peu attractives, parfois éloignées des standards, inégalement accessibles et guère adaptées à la mobilité, une absence de portabilité, des données nécessitant de multiples ressaisies, des ruptures de connexion entre les outils, des performances insuffisantes (…) Ces obstacles sont d’autant plus difficiles à franchir par les utilisateurs qu’il leur est proposé un foisonnement important d’outils et de ressources numériques sans que leurs usages ne soient clarifiés, ni que leur accès ne soit facilité ».
La stratégie du numérique pour l’éducation pour la période 2023-2027 vise à relever plusieurs défis :
- Renforcer la coopération nationale et locale entre les acteurs de l’éducation, autour de projets pédagogiques mobilisant le numérique là où il est pertinent ;
- Développer les compétences numériques des élèves ;
- Fournir aux professeurs une offre claire, mêlant outils et ressources numériques pour mettre davantage le numérique au service de la réussite des élèves ;
- Développer la robustesse, la sécurité, l’accessibilité, la qualité et l’écoresponsabilité des outils informatiques du ministère, pour simplifier le travail des agents et accroître ainsi la qualité du service rendu.
Une stratégie en 4 axes
La stratégie s’appuie sur 4 axes et pour chacun d’eux plusieurs actions clés.
Un écosystème engagé au service d’une politique publique partagée :
- Renforcer la gouvernance du numérique pour l'éducation aux niveaux national et local ;
- Partager des indicateurs à des fins de pilotage et d'évaluation ;
- Définir un équipement individuel type pour l'élève (collège et lycée) ;
- Un enseignement du numérique qui développe la citoyenneté et les compétences numériques ;
- Assurer l'acquisition des compétences numériques tout au long du parcours scolaire ;
- Permettre aux élèves de devenir des citoyen.ne.s éclairés à l'ère du numérique.
Une communauté éducative soutenue par une offre numérique raisonnée, pérenne et inclusive :
- Soutenir le développement des communs numériques ;
- Simplifier l'accès aux services numériques en créant un "compte ressources" ;
- Mettre le numérique au service de l’École inclusive ;
- Mieux former les équipes éducatives à la pédagogie avec le numérique.
Accompagner les enseignant.e.s dans le numérique éducatif :
- Organiser les services numériques éducatifs selon une logique de plateforme interopérable ;
- Mobiliser les données au service de l’École.
De nouvelles règles du jeu pour un système d’information ministériel au service de ses utilisateur.rice.s
- Accélérer la transformation numérique ;
- Gagner en efficience en amplifiant et en soutenant la mutualisation ;
- Gagner en fluidité et en qualité par l’intégration des principes de l'agilité et de l'expérience utilisateur ;
- Développer l'écoresponsabilité.
Pour atteindre tous ces objectifs, le ministère de l'Éducation nationale entend renouveler le partenariat avec les collectivités territoriales, qui « fournissent les moyens matériels, comme des infrastructures, des terminaux, en assurent l’installation et la maintenance, et financent de plus en plus souvent des ressources pédagogiques ». Ce partenariat devra « tenir compte des évolutions technologiques, notamment l’omniprésence des solutions hébergées dans le cloud, le matériel (smartphone, tablette, ordinateur portable, média interactif et immersif), l’émergence des ENT (espaces numériques de travail). Il est également nécessaire d’appréhender le numérique éducatif dans sa dimension « hors école ». Ce partenariat nouveau doit être noué aux différentes mailles – académies et régions, directions académiques et départements, intercommunalités, bassins et communes ».
Référence :
Soutien au développement des communs numériques
La stratégie numérique consacre un chapitre aux « communs numériques ». Elle désigne par là « un ensemble de ressources numériques produites et gérées par une communauté. Par nature, ils sont partagés et collectifs ». Elle mentionne plusieurs outils à la disposition des professeurs :
- La plateforme de services apps education.fr qui fournit des outils de collaboration ou de communication, comme « classes virtuelles » et visio-agents ou encore des outils permettant le partage de fichiers ou la publication de vidéos hébergées sur des infrastructures françaises
- La plateforme Éléa, fondée sur le logiciel libre Moodle, qui permet aux professeurs de créer et partager des ressources éducatives libres et des parcours pédagogiques numériques scénarisés à destination de leurs élèves.
- La plateforme «Magistère» qui met à disposition des professeurs et de tous les agents du ministère un large catalogue de ressources pour se former en ligne.
« Cette première version de l’offre nationale sera enrichie selon une feuille de route concertée avec l’ensemble des acteurs, des collectivités et des entreprises de l’EdTech ».
Les professeurs, notamment de NSI ou de SNT, sont en attente d’une « forge » qui leur permettrait de collaborer entre pairs et de partager du code informatique. Le ministère annonce la mise à disposition d’une forge technologiquement souveraine et mutualisée à l’échelle nationale.
Une doctrine technique du numérique pour l’éducation
Dans le prolongement de la stratégie, le ministère de l’éducation nationale a publié en mai 2023 une « doctrine technique du numérique pour l’éducation », « afin de mettre en place un cadre d’architecture et de règles communes, visant à fournir aux usagers un ensemble lisible et structuré de services numériques éducatifs accessibles simplement et interopérables ».
Vers un écosystème ouvert et interopérable
Cette doctrine technique prend en compte la croissance accélérée de l’utilisation des services numériques éducatifs dans les 1er et 2d degrés depuis 2020. « Les usages sont toujours plus nombreux, non seulement à des fins administratives et de suivi de la scolarité, mais aussi au bénéfice d’activités pédagogiques et de mise en œuvre des missions éducatives. Le corollaire est logiquement une augmentation conséquente de la fréquentation des services, qui nécessite à la fois une parfaite maîtrise des données ainsi qu’un écosystème ouvert et interopérable ».
Une logique de plateforme
L'idée est que l'État garantisse « à chaque acteur de l’éducation une égalité d’accès et un usage simple des services numériques dans un écosystème sécurisé, ouvert et interopérable à des fins de mise en œuvre des apprentissages dans le cadre des programmes et référentiels de compétences du ministère chargé de l’Education nationale ». A cette fin, « le numérique pour l’éducation doit se développer selon une logique de plateforme au sens d'un ensemble d’acteurs respectant un cadre d'architecture et des règles et standards communs, pour mettre à disposition des usagers un ensemble lisible et structuré de services accessibles simplement et interopérables entre eux (…) Le service public de l’éducation y gagne ainsi en agilité, permettant aux usagers et aux sociétés de la filière industrielle du numérique éducatif de bénéficier de services innovants, mais aussi en souveraineté en excluant toute solution non respectueuse des règles édictées, notamment en matière d’éthique et de protection des données ».
La doctrine technique, enfin, renvoie à trois référentiels en cours d’élaboration, dédiés aux exigences d’interopérabilité, de sécurité, de numérique responsable et qui ont vocation à devenir opposables par voie législative ».
Référence :
Pix+ Édu : vers une certification des compétences numériques des enseignant.e.s
La quasi-totalité des personnels d'éducation utilise le numérique pour préparer leurs cours (enquête Profetic 2018).
Seuls 16 % des enseignant.e.s dans le primaire et 29 % des enseignant.e.s de collège s’estiment bien ou très bien préparés dans la formation initiale à son utilisation (étude Cnesco 2021).
En vue de renforcer la formation des enseignant.e.s, un Pix spécifique, dénommé « Pix+ Édu » a été expérimenté sur quelques territoires pour préparer la future mise en place de la certification des compétences numériques des enseignants Pix+ EDU.
Ce parcours d’auto-positionnement permet aux enseignant.e.s de faire le point sur leur niveau de maîtrise des compétences numériques pour l’enseignement, et d’accéder à des ressources de formation en ligne.
Pix+ Édu couvre les compétences numériques transversales et professionnelles, différenciées pour le 1er et le 2d degré. Il prend la forme de questions, avec des recommandations de tutoriels.
Référence :
Une attestation de sensibilisation au numérique dès la 6e
Face aux enjeux d’éducation au numérique et, en particulier, pour sensibiliser à la lutte contre le cyberharcèlement, les discours de haine et les contenus illicites en ligne, le ministère de l’Éducation prévoit d’étendre l’attestation de sensibilisation au numérique sur l’ensemble du territoire, pour les élèves de 6e.
Près de 110 collèges volontaires l’ont expérimenté durant l’année scolaire 2022-23.
En 2023-2024, « Pix 6e » sera étendu à tous les collèges.
Pix 6ème donne lieu à une attestation, qui garantit que les élèves ont bénéficié de cette sensibilisation. Il comprend notamment un parcours spécifique « protection et sécurité », qui vise 4 compétences :
- sécuriser l’environnement numérique ;
- protéger les données personnelles et la vie privée ;
- protéger la santé, le bien-être et l’environnement ;
- prévenir le cyberharcèlement.
Depuis l'année scolaire 2021-2022, Pix est généralisé à partir de la classe de 5e, avec une certification des compétences numériques obligatoire pour les élèves de 3e au collège et de Terminale au lycée général, technologique et professionnel.
Référence :